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1 octobre 2009 4 01 /10 /octobre /2009 02:44
C'était dans les années 50, à cette époque j'habitais la Tunisie. Avec trois de mes camarades, nous avions une vingtaine d'années, nous prenions chaque hiver nos cartes d'abonnement pour le théâtre, nous aimions bien la tournée Karsenty. Ce soir là, nous venions de voir "l'Aigle à Deux Têtes" ou les "Parents Terribles" les deux étaient à l'affiche. Jouaient dans ces pièces Madame Edwidge Feuillère et Jean Marais. Les acteurs et la piéce avaient connu un triomphe avec de nombreux rappels. Nous remontions l'Avenue Jules Ferry vers une station de fiacres. Dans une rue qui longe le théâtre, il y a la sortie des artistes. Du bruit et des cris attirèrent notre attention. Des hommes se battaient. Ce n'était pas le genre de distraction qui nous rebuttait bien au contraire, surtout qu'il nous apparut qu'il y avait un déséquilibre parmi les combattants. Ils étaient quatre contre un. Ce n'était pas juste. Avec plaisir nous fonçons nous mêler à cette affaire bien qu'elle nous regardait pas. A l'instant ou nous commençons à nous coltiner avec les agresseurs, nous nous rendons compte que ces lâches c'étaient mis à quatre pour attaquer Jean Marais. Je peux vous assurer ayant fait le coup de poing avec lui, que Jean Marais c'est un sacré bagarreur, il n'a pas usurpé sa renommée de cascadeur et de bretteur. La bagarre fut magnifique, des coups il en pleuvaient. Nous les avons laissé sur le trottoir sans remords.
Jean Marais avait quitté sa veste au début de l'altercation, elle était maintenant en piteux état. Nous transpirions et quelques horions nous faisaient souffrir. Pourtant notre première réaction fut d'éclater de rire.

_Merci les gars, vous avez été formidables, j'en serais peut être venu à bout, mais c'était mieux avec votre aide. Comment vous appelez-vous ?

_Moi c'est Maxime, mes amis Charly et Jojo.

_On ne va pas se quitter comme ça, je vous invite à prendre un verre.

Nous sommes descendus "Au Caveau" et Jean Marais à tenu à offrir le champagne. Aimez-vous le Théâtre ? Je joue encore demain soir voulez-vous des places pour venir voir la pièce ?

_Non merci! Nous l'avons vue ce soir, c'était formidable. 

Nous avons bavardé une partie de la nuit, nous avions tant de questions à lui poser, sur le théâtre et le cinéma. Puis il a bien fallu se séparer, nous étions tous fatigués. Nous nous sommes chaleureusement serrés la main, il a voulu encore nous remercier.

A l'aéroport Nîmes-Garons, je prenais ce soir là, la Caravelle pour Paris. J'étais déjà installé à ma place et l'avion était presque plein, nous n'attendions plus que deux ou trois retardataires pour décoller. Je ne fis pas tout de suite attention au passager qui venait de s'asseoir près de moi. J'avais déjà attaqué le San Antonio que je venais d'acheter.

C'est quand l'Hôtesse  est venue nous proposer une boisson, que je me suis rendu compte que mon voisin c'était Jean Marais. Il lisait un journal et semblait très absorbé, il faut savoir que c'était un homme très réservé, timide et même distant. Je me doutais bien qu'il avait oublié cette rencontre mouvementée qui c'était passée de nuit dans une petite rue de Tunis, et puis nous avions changé en quinze ans, m'aurait-il reconnu !

San Antonio n'avait plus aucune saveur et Bérurier n'arrivait pas à me faire rire. Comment interpeller Jean Marais, sans le gêner ni le déranger. Je l'observais à la dérobée, et je remarquais qu'il ne manifestait nullement l'intention d'entamer la conversation. Je bouillais.

_Excusez moi Monsieur,

Il sursauta comme si du courant était passé dans son siège.

_Je vous demande pardon, c'est à moi que vous causez ?

_Oui monsieur, voici un long moment que j'hésite, et pourtant j'ai bien envie de renouer une conversation que nous n'avons sûrement pas terminée, car voyez vous, nous nous sommes déjà rencontré.

_En êtes-vous sûr, car moi je n'en ai pas le souvenir, je ne crois pas vous connaître.

_Vous vous souvenez avoir interpréter avec Mme Edwidge Feuillère "L'Aigle à Deux Têtes" avec la tournée Karsenty et cela au Théâtre de Tunis ?

_Certainement, j'en ai gardé un très bon souvenir, nous avions eu un  bon public.

_Il ne s'est rien passé à la sortie dont vous vous souviendrez ?

Il fronça les sourcils comme quelqu'un qui réfléchit intensément.

_Si, si, une bagarre contre quatre voyous. Vous seriez un de ces trois garçons qui sont venus me preter mains-fortes?

_Oui ! Je suis un de ceux là.

_La glace était rompue, nous avons revécu en détail plusieurs fois cette soirée, nous avons bien ri et le voyage nous a semblé très court.

_Vous savez si j'ai eu le courage de vous interpeller, c'est principalement pour ma fille Christine, elle veut faire du théâtre et elle a surtout une admiration sans borne pour vous. Alors j'ose maintenant vous demander pour elle un mot de recommandation et d'encouragement de votre main.

_Mais avec le plus grand plaisir.

_Il a pris dans sa serviette un bristol, et a écrit dessus un mot tout à fait aimable et affectueux.

Nous étions arrivé, nous nous sommes serrés la main, puis rapidement la foule l'a happé.

_Regarde ma fille ce que papa te rapporte de son voyage à Paris.
i
Je ne sais pas si j'ai eu une autre occasion de faire autant plaisir à ma fille... Elle a fait encadrer ce bristol et depuis c'est son porte bonheur. Elle a fait une belle carrière d'actrice, maintenant elle monte des pièces fait de la mise en scène et donne des cours. Avec ce bristol qui était devenu son sésame, elle a pu rencontrer plusieurs fois Jean Marais à Paris et à Valauris. Il l'a toujours reçu avec la plus grande attention et gentillesse. C'est avec affection que nous gardons son souvenir








_

 
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commentaires

N
Quel beau moment de lecture et quel beau souvenir...Aujourd'hui encore, Jean Marais est toujours là. La photo de son portrait au cadre argenté est accrochée dans le salon et près de lui son fameux bristol...
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